
J'avais déjà écrit un petit article sur ce monument
ici. Mais je suis tombé récemment sur un petit dépliant non signé mais très complet que je me permets de reproduire en intégralité ci-dessous. Ce dépliant est disponible aux heures d'ouverture de la Tour (tous les mardis de 10h à 12h) (
Google Maps).
"Elevée à partir de 1380 par le riche drapier et amateur de beaux bâtiments, doyen séculier et magistrat, Jean Wautrec, cette Tour est construite à l'endroit stratégique pour entrer dans la ville de Verdun par la face est.
Il voulut que cette Tour soit encore plus belle et plus haute que les trente tours déjà existantes carrés ou cylindriques, les unes couronnées de mâchicoulis et pouvant recevoir un ou deux étages d'artillerie, les autres couvertes de combles coniques sommés de l'aigle germanique.
Il fit donc construire deux grosses tours rondes et jumelles rattachées par un portique abritant le couloir de liaison intérieur et la chambre des herses. C'est cette tour que l'on peut admirer aujourd'hui.
Son architecture rappelle celle de la Bastille de Paris. Elle comprend trois étages au-dessus de la cave et se termine par une terrasse portant un couronnement à créneaux et à mâchicoulis. A la base de la Tour, les murs extérieurs ont une épaisseur de 1m75.
Malgré la solidité que Wautrec avait voulu donner à sa Tour, il fallut démolir entièrement la partie contiguë à la rue des Sergents (partie gauche), à la suite d'un affaissement du sol survenu en 1690. On la reconstruit sur le modèle exact à l'autre moitié et avec les anciennes pierres de façon à conserver sa symétrie et son cachet. De cette construction date : l'arcade en plein cintre ainsi que, du côté est, le fronton d'ordre Toscan qui dissimule l'ancienne porte ogivale.
L'édifice appartint à la Ville de Verdun jusqu'au 4 novembre 1754. A cette date, en l'échange d'une décharge de paiement du concierge des anciennes prisons et de leur entretien par la commune, la royauté s'en empara pour en faire une prison militaire. Mais à partir de 1880, soit un siècle plus tard, l'Etat en fut embarrassé et la mit en vente si bien que la Ville de Verdun la racheta en 1899 pour le prix de 5 025 F d'époque, alors qu'elle lui appartenait de droit, mais à cette époque, la ville était riche et se trouvait en pleine expansion par la construction des forts. Il faut rappeler que c'est à cette époque que nombre de grands édifices seront construits : Théâtre, Mess des Officiers, collège Buvignier.
Vers 1880, le Génie Militaire trouvant le porche trop étroit pour le passage des troupes et des chariots voulut agrandir l'ouverture et même démolir la Tour. L'opinion publique locale s'émut tellement, et à juste titre, que la Tour resta intacte. On supprima seulement le pont-levis donnant sur la Meuse et on remblaya au pied nord de la Tour une large voie d'accès permettant le dégagement sur la rue Boulhaut. Mais en construisant le mur de soutènement de cette voie, on dissimula le pied droit de la Tour qui baignait dans l'eau de la rivière. L'émotion de la ville se calma définitivement lorsque la Tour fut classée monument historique le 21 mars 1881...
C'est également en 1880 que le Pont Chausée fut reconstruit en pierre de taille en forme de pont voûté d'allure lourde et massive. Ajoutons que ce pont fut détruit en 1916 et après la première guerre mondiale, on décida de mettre la Tour plus en valeur et lors de l'aménagement du quai de Londres, on démolit les maisons côté sud accolées à la Tour.
En 1940, le pont fut à nouveau détruit et reconstruit en 1950 après une vive polémique. En effet, architectes et urbanistes avaient suggéré d'aménager devant la porte moyenâgeuse une jolie passerelle du même style, ce qui sans nuire à la beauté de la Tour, l'aurait au contraire mise en relief, car les pieds, à nouveau dégagés, auraient baigné dans l'eau. Un autre pont routier aurait été construit dans le prolongement de l'avenue Garibaldi. En fait, les architectes ne faisaient que reprendre le projet de Vauban qui en 1698 avait eu l'intention de faire construire un pont couvert à cet endroit pour barrer la Meuse sur cette face.
Les murs et les plafonds des salles ont été plâtrés et peints mais la cage d'escalier en bois et les portes ont gardé leur cachet d'origine avec leurs vieux gonds de fer noir, leurs grossiers verrous et leurs antiques judas.
La silhouette de la Tour Chaussée est connue du monde entier. Elle a servi d'emblème aux insignes militaires et même au génie militaire américain en hommage à Jean Nicolas Désandrouins, né à Verdun en 1729 et commandant de Génie du Corps Expéditionnaire français pendant la guerre d'indépendance de l'Amérique.
Les poètes chantèrent aussi les exploits de la Tour (cf. poème d'Edmond Pionnier écrit au début du siècle avant la première guerre mondiale)."
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