
La première chose que nous avons faite en arrivant à Stenay fut de nous rendre à l'office du tourisme pour récolter un peu de documentation sur cette ville du nord meusien où nous comptions passer la journée. Et là, au fond de la pièce, je vois toute une série de diables grimaçants qui me font de l'oeil. Pourquoi, demandais-je alors à l'officier du tourisme, ces diables tiennent-ils une place si importante en ce lieu au demeurant fort sympathique ?
Le ciel s'obscurcit brutalement ; la ville, qui était pourtant animée quelques minutes auparavant, semblait maintenant déserte. Alors que le tonnerre grondait à l'extérieur, l'officier du tourisme s'approcha subrepticement derrière moi, et d'une voix caverneuse lança : "Parce que Stenay est la ville du Diable ! SATHANAY ! SATHANAY ! Ah ! Ah ! Ah !".
Et, au moment où nous allions partir, il ajouta "vous prendrez bien quelques crottes de Satan, ces petites dragées au chocolat saupoudrées de sucre glace sont la spécialité de la ville".

Avant d'aller grignoter un petit quelque chose et de nous rendre au musée européen de la bière nous décidâmes de faire le tour du centre ville et d'aller voir à quoi ressemblait le port de plaisance, l'occasion de constater de visue que le Diable avait bien sa place sur les écussons de Stenay, jusqu'au fronton de l'hôtel de ville et au monument aux morts.
Visiblement, ce mythe a été construit de toute pièce au XIXe siècle par le Président du Tribunal de Montmédy, Jeantin, qui avait la facheuse manie d'expliquer les noms des lieux par d'obscures références hébraïques et géologiques. C'est en 1885 que cette nouveauté héraldique apparait sur le papier à en-tête de la mairie et, lorsqu'en 1925 l'Hôtel de Ville est installé à son emplacement actuel, l'architecte croit bon de faire sculpter la tête de diable au fronton.
Quoi qu'il en soit, il est totalement impossible que la ville de Stenay, qui trouve ses origines à l'époque mérovingienne, puisse tenir son nom d'un concept né avec les évangiles aux alentours du Ve siècle.
A Stenay, personne ne prend réellement au sérieux cette accointance avec Satan, mais chacun en joue à sa manière. Même le Maire s'y est mis en créant une "Confrérie des diablotins de Stenay" en 1983.
Allez hop ! en route pour le musée de la bière. On va aller voir s'ils vendent de la Belzebuth ou de la Satan Gold...